Définition
On parle de douleur chronique dès lors que celle-ci persiste depuis plus de trois mois. Elle peut être accompagnée d’un retentissement fonctionnel dans les actes de la vie quotidienne. Cette douleur n’est pas forcément statique : elle est susceptible d’évoluer au fur et à mesure de vos activités journalières.
Selon l’INSERM, 30% des adultes se plaignent de douleurs chroniques. Cette incidence augmente avec l’âge et touche davantage les femmes.
Les douleurs chroniques peuvent se diviser en 4 catégories :
- les douleurs neuropathiques, dues à l’atteinte des nerfs ou du système nerveux central.
- les douleurs nociceptives : déclenchées par la stimulation des nocicepteurs (= récepteurs de la douleur) en raison d’une inflammation ou d’une lésion d’un tissu. C’est par exemple le cas de l’arthrose.
- les douleurs mixtes qui associent une composante neuropathique et une composante inflammatoire. Elles sont notamment observées dans le cadre de cancers.
- les douleurs fonctionnelles (fibromyalgie, troubles fonctionnels intestinaux)
Mécanisme
Dans cet article je m’intéresse aux douleurs fonctionnelles, c’est-à-dire non associées à une lésion ou cause objective.
Contrairement à une douleur aigue, la douleur perd ici sa signification de signal d’alarme pour évoluer vers un syndrome chronique ; elle se met alors en « mémoire ». Plus la douleur persiste, plus le cerveau l’intègre : c’est l’apprentissage cérébral. Le cerveau continu de percevoir de la douleur sans cause apparente. Cela s’explique par la plasticité (= capacité à se remodeler) du système nerveux central, qui est susceptible d’altérer les systèmes de contrôle de la douleur et par exemple d’amplifier le message douloureux.
Mais le contrôle de la douleur est un problème multi dimensionnel qui va bien au-delà de la neurophysiologie. Il a notamment été montré que les centres cérébraux responsables de la perception de la douleur, sont étroitement liés aux centres des émotions. Par exemple, le contexte familial, professionnel ou social peut contribuer à la chronicité de la douleur.
D’autre part, la sensation douloureuse peut être exacerbée avec la fatigue, l’anxiété, la dépression, la nervosité, l’inquiétude, la peur d’avoir mal, le manque d’activité physique, etc. D’autres facteurs psychosociaux peuvent entretenir cette douleur tels que :
- la kinésiophobie : il s’agit de la peur de la douleur due au mouvement. Lorsque l’on se blesse, il est normal de craindre les gestes susceptibles de reproduire ou d’augmenter la douleur. Mais si cette peur persiste de manière exagérée et infondée, elle engendre alors un comportement d’évitement. Un cercle vicieux se crée entrainant une hypervigilence, un déconditionnement physique, le retard d’activités « normales » et une douleur perpétuelle.
- des croyances : ce que pense une personne de son affection change la façon dont elle s’y adapte. Il arrive que certains aient une vision faussée de ce qui se passe réellement. Prenons l’exemple d’une personne ne se plaignant d’aucunes douleurs. Si on lui fait passer une IRM et que celle-ci dévoile une hernie discale, il y a de grandes chances pour que dans l’avenir, elle associe une éventuelle douleur de dos à cette hernie. Pire encore, cela peut parfois déclencher un effet nocebo : l’individu va se persuader que cette hernie est un problème au point que cela va engendrer une douleur.
Enfin, l’attention permanente impacte la chronicisation de la douleur. Une personne dont l’attention est sollicitée ressentira moins la douleur qu’une personne focalisée dessus.
Prise en charge
La stratégie thérapeutique vise alors, non pas la prise en charge de la douleur, mais du patient douloureux. Il faut par conséquent prendre en compte toutes les facettes d’une douleur (physiques, psychologiques, sociales) afin de rompre les divers cercles vicieux responsables de sa persistance. C’est pourquoi la prise en charge d’une douleur chronique est souvent pluridisciplinaire (ostéopathie, kinésithérapie, soutient psychologique, etc.) et nécessite parfois de changer les habitudes du patients.
La thérapie manuelle peut aider à « reprogrammer » le cerveau en diminuant la douleur sur un temps (variable d’un patient à l’autre). On accorde ainsi une fenêtre antalgique permettant notamment de réintégrer une activité physique aux patients qui la redoutent.
La prise en charge psychologique via l’hypnose, les thérapies cognitives ou comportementales, la thérapie miroir […] sembles également efficaces pour cette « reprogrammation ». Elles peuvent diminuer l’invalidité, l’anxiété ou la dépression associées à la douleur chronique.
Enfin, il est essentiel que le patient comprenne sa douleur et en devienne acteur pour ne plus la subir. Par ailleurs, le fait d’accepter la douleur aide à diminuer son intensité.
Pour finir, rappelons que le traitement rapide d’une douleur aigue est la meilleure prévention d’une évolution vers un syndrome douloureux chronique.